MHD condamné à 12 ans de prison: quels éléments ont mené à ce verdict?

Trois ans après le meurtre de Loïc, le rappeur MHD, qui avait été placé en détention provisoire en 2019, a été jugé coupable de meurtre et condamné à 12 ans de prison.

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Retour sur les faits

MHD, de son vrai nom Mohamed Sylla, a été condamné samedi 23 septembre 2023 à 12 ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de Paris pour le meurtre d’un jeune homme de 23 ans lors d’une rixe mortelle à l’été 2018, à Paris.

Il a toujours nié avoir participé à ce crime, qui s’inscrit dans le cadre d’un règlement de comptes entre bandes rivales des cités des Chaufourniers et de la Grange-aux-Belles, situées dans les Xe et XIXe arrondissements.

Dans la nuit du 5 au 6 juillet 2018, Loïc K., un jeune de la cité de la Grange-aux-Belles, est renversé par une Mercedes appartenant à Mohamed Sylla, puis frappé et poignardé à mort par une dizaine d’individus cagoulés. La voiture est retrouvée le lendemain incendiée dans un parking. Les auteurs du meurtre appartiendraient à la cité des Chaufourniers, un quartier rival avec lequel les affrontements, de plus en plus sanglants, sont continus.

L’historique

Le rappeur MHD, âgé de 27 ans, est une star de l’afro-trap, un genre musical mêlant rap et influences africaines. Il s’est fait connaître en 2015 avec son titre Afro Trap Part. 1 (La Moula), qui a cumulé plus de 20 millions de vues sur YouTube. Il a ensuite enchaîné les succès, comme Champions League, Roger Milla ou Bella, en duo avec Wizkid.

Le rappeur a sorti deux albums, MHD en 2016 et 19 en 2018, et a collaboré avec des artistes internationaux comme Major Lazer, Diplo ou Stromae.

Il a également fait ses débuts au cinéma en 2019 dans le film Mon frère de Julien Abraham.

La carrière d’MHD a été brutalement interrompue par son arrestation en janvier 2019, dans le cadre de l’enquête sur le meurtre de Loïc K. Il a passé plus d’un an en détention provisoire, avant d’être remis en liberté sous contrôle judiciaire en juillet 2020, après le versement d’une caution de 100 000 euros.

Il a alors repris son activité musicale, sortant un single intitulé Afro Trap Part. 11 (King Kong) et annonçant un concert à l’AccorHotels Arena de Paris pour le 29 septembre 2020, qui a été annulé en raison de la pandémie de Covid-19.

Il a également participé à la bande originale du film La nuit venue de Frédéric Farrucci, sorti en 2020.

Son procès s’est ouvert le 4 septembre 2023 devant la cour d’assises de Paris, où il comparaissait avec huit autres accusés, dont sept ont été condamnés à des peines allant de 10 à 15 ans de prison. Le parquet avait requis 18 ans de réclusion criminelle contre le rappeur, estimant que sa participation au meurtre était établie par l’analyse d’éléments de preuve retrouvés ailleurs que sur la scène du crime.

Quels sont les éléments de preuve dans le procès d’MHD

Les preuves contre le rappeur MHD reposent principalement sur des témoignages et des vidéos de la scène du crime, filmées par des caméras de vidéosurveillance et par un témoin depuis son balcon. Ces séquences, filmées de nuit et de loin, montrent un homme aux cheveux teints en blond, vêtu d’un survêtement Puma, qui serait Mohamed Sylla.

A cette époque, le rappeur avait effectivement les cheveux décolorés et était ambassadeur de la marque de sportswear. De plus, plusieurs témoins ont mis en cause le rappeur, affirmant l’avoir vu à bord de la Mercedes qui a renversé Loïc K. ou l’avoir reconnu sur les vidéos.

Les enquêteurs ont également établi que la Mercedes incendiée appartenait au rappeur, qui l’avait prêtée à un ami le soir des faits. Ils ont aussi retrouvé des traces ADN du rappeur sur une casquette abandonnée sur les lieux du crime, ainsi que sur un couteau saisi chez l’un des coaccusés.

Enfin, ils ont exploité les données téléphoniques du rappeur, qui ont révélé qu’il avait été en contact avec plusieurs des autres accusés avant et après le meurtre, et qu’il avait éteint son portable pendant une heure au moment des faits.

Les incohérences soulevées par la défense d’MHD

La défense du rappeur MHD a contesté la fiabilité des preuves présentées par l’accusation, dénonçant un “fiasco judiciaire” et un dossier “construit à partir d’une rumeur”.

Selon ses avocats, les vidéos de la scène du crime sont trop floues et trop sombres pour permettre une identification formelle du rappeur, qui n’est pas le seul à avoir les cheveux blonds et à porter des vêtements Puma.

Ils ont également souligné que les témoins à charge étaient peu crédibles, car certains étaient liés à la victime ou à la cité de la Grange-aux-Belles, et que la plupart avaient refusé de se présenter aux convocations de la cour d’assises.

La défense a aussi remis en cause la provenance de la casquette et du couteau portant l’ADN du rappeur, qui auraient pu être déposés sur les lieux du crime ou chez le coaccusé par des tiers.

Elle a en outre expliqué que le rappeur avait prêté sa Mercedes à un ami sans savoir qu’il allait s’en servir pour participer à la rixe, et qu’il avait éteint son portable pour dormir, après avoir passé la soirée chez sa petite amie. Elle a enfin rappelé que le rappeur n’avait aucun antécédent judiciaire, qu’il n’était pas impliqué dans les rivalités entre bandes, et qu’il n’avait aucun motif de tuer Loïc K., qu’il ne connaissait pas.

MHD a clamé son innocence tout au long du procès, affirmant qu’il n’était pas présent sur les lieux du crime et qu’il ignorait tout de ce qui s’était passé. Il a déclaré qu’il était victime d’un “acharnement judiciaire” et d’une “erreur judiciaire”, et qu’il espérait que la vérité éclaterait un jour.

MHD a également exprimé ses regrets pour la famille de la victime, à qui il a présenté ses condoléances. Il a enfin demandé à ses fans de ne pas le lâcher et de continuer à le soutenir, malgré sa condamnation.